Après la diffusion sur 2M du concert d’El Grande Toto à Mawazine, la HACA a tranché. Saisie de plus de 190 plaintes dénonçant des scènes jugées contraires aux bonnes mœurs, l’instance de régulation de l’audiovisuel a choisi de ne pas sanctionner la chaîne publique. Une décision argumentée, rendue publique le 17 juillet, qui marque un signal fort en faveur de la liberté d’expression et de la diversité culturelle.
À l’origine de l’affaire, le passage très médiatisé du rappeur sur la grande scène de l’OLM Souissi, devant une foule estimée à 400 000 spectateurs. Ce concert, diffusé en différé sur 2M en seconde partie de soirée, a suscité des réactions contrastées. Si les jeunes y ont vu une reconnaissance symbolique de leur culture, d’autres ont dénoncé un programme inadapté à une chaîne publique.
Entre le 2 et le 7 juillet, la Haute autorité de la communication audiovisuelle a reçu près de 200 réclamations. En cause, certaines paroles, attitudes ou choix de mise en scène jugés inappropriés par les plaignants, qui invoquaient un manquement à la morale publique et un risque pour l’éducation des jeunes.
Réuni en plénière, le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle a examiné l’ensemble des saisines. Il a décidé de les classer sans suite, tout en adressant aux plaignants une réponse circonstanciée. Selon les délibérations, le rôle du régulateur n’est pas d’évaluer la qualité artistique d’une œuvre, ni de se substituer aux choix éditoriaux des diffuseurs. L’autorité rappelle qu’elle veille au respect de la loi, à la diversité des expressions culturelles et à la protection des publics, mais sans jamais exercer de censure.
Le Conseil estime que le service public a un devoir d’ouverture envers toutes les générations, y compris en diffusant des contenus issus des cultures urbaines. Il note cependant que cette ouverture doit s’accompagner d’un cadre de diffusion approprié. Dans le cas du concert d’El Grande Toto, diffusé après 23h05, la chaîne a respecté les plages horaires définies pour les programmes sensibles. Le régulateur recommande néanmoins un renforcement des dispositifs de signalétique et un soin accru dans la contextualisation éditoriale.
L’affaire El Grande Toto illustre les tensions persistantes autour de la représentation des nouvelles formes culturelles dans l’espace audiovisuel. Rappeur adulé par une partie de la jeunesse, controversé pour ses propos et son comportement, l’artiste reste clivant. Mais pour la HACA, cette polarisation ne justifie pas l’exclusion du débat public.
En affirmant sa position, l’autorité défend une vision pluraliste du service public. Elle rappelle que l’inclusion ne peut se faire sans un engagement sincère envers toutes les expressions artistiques, même celles qui dérangent. Refuser de céder à la pression d’une partie de l’opinion, tout en appelant à la vigilance éditoriale, c’est aussi rappeler que la régulation ne se confond pas avec la censure.
