24.1 C
Casablanca
jeudi 10 juillet 2025

Intelligence artificielle : les tribunaux sommés de prendre le virage technologique

L’intelligence artificielle ne se contente plus d’occuper les débats technologiques. Elle s’invite désormais dans le quotidien des juristes, transformant en profondeur les pratiques professionnelles. À Rabat, lors d’une conférence très suivie, Omar El Kalai, ingénieur, physicien et juriste, a dressé un constat clair : les métiers du droit doivent s’emparer de ces outils sous peine d’être dépassés par la marche du progrès.

Face à l’enchevêtrement croissant des dossiers, à la montée des enjeux techniques et financiers, et à l’exigence d’une réactivité accrue, l’IA s’impose comme un levier de transformation. Loin de relever de la science-fiction, elle joue déjà un rôle tangible dans de nombreuses missions juridiques.

L’analyse sémantique, la rédaction assistée, l’extraction d’informations ou encore la prédiction des risques sont autant de domaines où ces technologies offrent des gains notables. Grâce aux avancées en traitement du langage et à l’IA générative, les juristes peuvent hiérarchiser les priorités tout en se libérant du temps pour des tâches stratégiques.

L’aide à la rédaction constitue l’un des apports les plus concrets. Un modèle intelligent peut structurer un jugement, synthétiser des faits ou renforcer la cohérence d’un raisonnement juridique, sans pour autant remplacer l’humain. Il agit comme un copilote, au service d’une justice plus rapide et plus précise. L’analyse automatisée des contrats, notamment dans les marchés publics, permet également de détecter les clauses sensibles et de gagner en efficacité. Omar El Kalai a ainsi co-développé un assistant IA spécifiquement entraîné sur des documents marocains, garantissant un traitement localisé et sans transfert de données, preuve d’un usage éthique et adapté au contexte.

Dans les litiges financiers, la technologie dévoile toute sa puissance : reconstituer des chronologies complexes, comparer des écarts contractuels ou visualiser des flux d’opérations deviennent des démarches plus accessibles et plus rapides, même dans les dossiers les plus lourds.

Mais cette transformation ne s’accompagne pas sans un renouvellement des compétences. Maîtriser les bases du machine learning, formuler des requêtes pertinentes, interpréter des résultats tout en gardant une distance critique deviennent des savoir-faire essentiels. Car si l’IA peut guider, seul le juriste peut trancher.

Cette mutation impose aussi de nouvelles manières de travailler. Les juristes de demain devront dialoguer avec des data scientists, collaborer avec des développeurs, conjuguer des approches pluridisciplinaires. L’innovation juridique naîtra de ces passerelles.

Reste que la technologie n’est pas sans risques. Biais d’entraînement, erreurs, approximations peuvent entraîner des dérives aux conséquences juridiques majeures. La vigilance devra donc rester constante.

spot_img
- Advertisement -

L'invité du Nouvelliste Maroc

spot_img
spot_img