Le Maroc met les gaz. C’est, en substance, ce que révèle une note stratégique de BMCE Capital Global Research, publiée ce 9 octobre, qui détaille les contours d’une montée en puissance maîtrisée du gaz naturel dans le mix énergétique national. Dans un contexte de recomposition des flux mondiaux et de pressions sur les approvisionnements, le Royaume accélère ses investissements et consolide ses ambitions en matière de souveraineté énergétique.
BKGR insiste sur le rôle stratégique du gaz dans la transition énergétique marocaine. Perçu non pas comme une énergie de substitution, mais comme un levier de flexibilité et de compétitivité industrielle, le gaz s’inscrit dans une feuille de route nationale à horizon 2050. À la clé : diversification des sources, stimulation des filières industrielles, renforcement de la sécurité énergétique et attractivité des investissements.
Au cœur de cette dynamique, le projet de gazoduc Nigeria-Maroc (NMGP) occupe une place centrale. BKGR le qualifie de « tournant continental », capable de connecter treize pays africains et de transporter jusqu’à 30 milliards de m³ de gaz par an dès 2032. Le tronçon marocain, entre Nador et Dakhla, lancé en juillet dernier, mobilisera plus de 6 milliards de dollars d’investissements et générera des milliers d’emplois dans le Sud du pays.
Les impacts macroéconomiques sont significatifs. D’après les estimations de BKGR, le gazoduc pourrait ajouter entre 0,5 et 1 point de croissance annuelle du PIB pendant sa construction, et entre 0,2 et 0,4 point à terme, grâce aux revenus de transit et à la relance industrielle qu’il entraînerait. À plus long terme, le gain cumulé pour l’économie nationale pourrait atteindre entre 5 et 8 % du PIB d’ici 2040.
La note souligne aussi la montée en puissance des infrastructures internes : extension de la centrale de Tahaddart, développement de celle d’Al Wahda, mise en service d’un terminal GNL flottant à Jorf Lasfar et intégration d’une infrastructure similaire à Nador West Med. L’ensemble forme un socle logistique cohérent, pensé pour accompagner la montée en charge des besoins nationaux.
Si la production locale reste encore marginale, les projets de Tendrara et du permis Anchois montrent un potentiel croissant. BKGR évoque aussi l’émergence d’un hub de GNL et l’intégration à terme de gaz verts comme l’hydrogène ou le biométhane, en s’appuyant sur les infrastructures existantes.
L’étude ne néglige pas les défis, notamment le retard accumulé dans certaines installations et la nécessité de sécuriser les financements. Mais pour BKGR, le Maroc avance avec méthode, combinant investissements, diplomatie énergétique et intégration régionale pour faire du gaz un levier stratégique à long terme.