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jeudi 30 octobre 2025

Grosse crise en vue à l’Agence marocaine du médicament

Moins d’un an après son lancement officiel, l’Agence Marocaine du Médicament et des Produits de Santé (AMMPS) traverse une zone de turbulence. À l’approche de la date limite fixée pour la période de détachement temporaire de son personnel, prévue le 30 novembre, un mouvement de retour collectif vers les postes d’origine semble se dessiner. En cause : une défiance grandissante envers une gouvernance jugée opaque, et une absence de dialogue avec les professionnels du secteur.

Le bureau national du syndicat de l’AMMPS, affilié à l’Union marocaine du travail, a adressé le 28 octobre une demande de réunion urgente au ministre de la Santé. L’objectif est clair : organiser les conditions de réintégration des fonctionnaires détachés à leurs administrations d’origine, en conformité avec la loi 10-22 encadrant la création de l’Agence. Selon une évaluation interne menée par les représentants syndicaux, plus de 80 % des agents souhaitent quitter l’AMMPS à l’issue de la période de rattachement temporaire. Seule une minorité envisage de rester, sous réserve de bénéficier des garanties prévues par le décret n°2-21-344.

Ce climat tendu au sein de l’Agence ne fait qu’accentuer une crise plus large qui couve depuis plusieurs mois. Depuis l’arrivée d’Amine Tahraoui à la tête du ministère de la Santé, six organisations syndicales ont formé une coalition pour dénoncer ce qu’elles qualifient de gestion unilatérale et méprisante. Le 3 janvier, l’adoption des statuts des agences du sang et du médicament, sans la moindre concertation avec les syndicats, a mis le feu aux poudres. Réunis sous la bannière de la Coordination syndicale nationale du secteur de la santé, les représentants des personnels ont adressé une lettre ouverte au Chef du gouvernement pour condamner une méthode de gouvernance « autoritaire et sans transparence ».

Dans cette même missive, les syndicats pointent aussi le blocage persistant de l’accord du 23 juillet, censé encadrer plusieurs avancées sociales dans le secteur. Bien que validé de principe, le texte reste lettre morte, malgré plusieurs réunions entre les syndicats et le ministère. Ce retard est vécu comme un camouflet. Les promesses de mise en œuvre, formulées lors des premiers échanges avec le ministre, n’ont jamais été suivies d’effet. Selon les représentants syndicaux, les discussions sont désormais gelées, les engagements oubliés.

Le secteur pharmaceutique, en contact direct avec les services de l’AMMPS, observe la situation avec inquiétude. Plusieurs sources professionnelles alertent sur le risque d’une désorganisation complète des mécanismes d’évaluation et de contrôle des produits de santé. Le départ massif des experts détachés menacerait, selon elles, la stabilité de toute la chaîne d’approvisionnement, jusqu’à remettre en cause la sécurité médicamenteuse du pays.

Cette crise de gouvernance pourrait ne pas s’arrêter là. Les syndicats redoutent que la même logique de décision unilatérale soit appliquée à la mise en place du futur statut des Groupements sanitaires territoriaux. Une telle approche sans concertation ne ferait qu’exacerber un malaise déjà profond.

La Coordination syndicale appelle désormais à une intervention directe du Chef du gouvernement. Elle demande le respect immédiat des engagements de l’accord du 23 juillet, la révision des statuts adoptés sans dialogue, et un retour à une gestion participative. À défaut, elle laisse planer la menace d’un mouvement de protestation d’envergure.

Dans un secteur aussi stratégique, la paralysie administrative ou la démobilisation des équipes de terrain ne seraient pas sans conséquences. La stabilité du système de santé est en jeu.

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