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Peines alternatives : Agadir ouvre le bal

Peines alternatives : Agadir ouvre le bal

Le tribunal de première instance d’Agadir a franchi une étape inédite en matière judiciaire. Pour la première fois au Maroc, une condamnation a été assortie d’une peine alternative, conformément à la loi 43.22, entrée en vigueur le 22 août. Le dossier portait sur une infraction de commerce illégal d’alcool. L’accusé, condamné à deux mois de prison ferme et à une amende de 500 dirhams, a pu voir sa peine d’emprisonnement remplacée par une contribution financière journalière de 300 dirhams, plafonnée à 18.000 dirhams.

Ce jugement, bien que rendu en première instance, marque la toute première application concrète de cette réforme législative. Il intervient au moment où la présidence du Ministère public diffuse un guide pratique de 257 pages destiné à orienter les procureurs dans la mise en œuvre de ces nouvelles sanctions. Ce document s’inscrit dans une réforme plus large, qui cherche à réduire la pression sur les établissements pénitentiaires tout en offrant aux magistrats un cadre clair d’action.

Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire a, de son côté, diffusé une circulaire détaillée à l’ensemble des juridictions, fixant les règles d’application et les exigences procédurales. L’objectif est de garantir une mise en œuvre cohérente et efficace de ces peines de substitution à travers tout le territoire.

Le guide élaboré par la présidence du Ministère public ambitionne d’équilibrer la protection de la société, la réparation des torts causés aux victimes et la réinsertion des condamnés. Présenté par le procureur général du Roi près la Cour de cassation, Hicham Ballaoui, ce document détaille les différentes catégories de peines alternatives, les infractions éligibles, les modalités de leur application et le suivi à instaurer.

Ce texte s’aligne sur les directives exprimées par S.M. le Roi Mohammed VI dans Son discours du 20 août 2009, appelant à une modernisation du système pénal et à l’introduction de mécanismes adaptés aux mutations sociales. Il met notamment en avant la médiation, la conciliation, l’arbitrage et les peines alternatives comme leviers d’une justice plus humaine et plus efficace.

Le document ne se limite pas à des considérations théoriques. Il propose des modèles concrets, s’appuie sur des exemples internationaux et fournit des outils opérationnels aux magistrats. Il rappelle aussi les conditions précises nécessaires à l’adoption de ce type de sanctions. Avant de substituer une peine privative de liberté, le juge doit évaluer la personnalité du condamné, ses antécédents, la nature des faits, et s’assurer que les droits de la victime sont préservés.

La mise en œuvre de ces peines suit un protocole bien défini. Après proposition du parquet ou du tribunal, le jugement doit détailler la sanction retenue. Le juge d’application des peines prend ensuite le relais pour en contrôler l’exécution. Des rapports réguliers sont exigés et peuvent entraîner une révision, voire une révocation de la mesure, en cas de non-respect par le condamné. Le dispositif prévoit ainsi un suivi rigoureux et adaptable selon l’évolution du comportement de l’intéressé.

Cette réforme ne se limite pas à désengorger les prisons. Elle vise aussi à réduire la récidive, alléger les charges de l’État et renforcer l’impact social de la justice pénale. Le pari est ambitieux : concilier sanction, prévention et réintégration, dans une logique de modernisation portée par une volonté claire du Souverain.

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