Accueil Dossiers Spéciaux & Décryptages Trump surtaxe le Maroc : menace ou levier stratégique pour le Royaume...

Trump surtaxe le Maroc : menace ou levier stratégique pour le Royaume ?

Envois d’argent : le Maroc frappé par la taxe Trump

Le retour de Donald Trump sur le devant de la scène politique américaine ne passe pas inaperçu. Fidèle à sa doctrine « America First », il vient de réactiver une politique commerciale musclée : surtaxe généralisée de 10 % sur toutes les importations. Une décision qui, à première vue, n’épargne personne. Pour le Maroc, partenaire commercial stratégique, l’impact est aussi immédiat que brutal.

Les exportations agricoles, en particulier les fruits, légumes et produits transformés, sont parmi les premières touchées. L’industrie textile, qui a misé sur l’accès au marché américain pour relancer ses carnets de commandes, voit sa rentabilité compromise. Quant au secteur automobile, fleuron industriel du Royaume, il risque de perdre en compétitivité, notamment sur les pièces exportées vers l’Amérique du Nord. L’effet domino se propage à travers toute la chaîne de valeur, menaçant des milliers d’emplois.

Mais à y regarder de plus près, cette surtaxe n’est pas qu’un obstacle. Elle agit comme un révélateur. Le Maroc, à travers ce choc, prend conscience de la fragilité d’une dépendance excessive à certains marchés. Cette situation, bien que contraignante, pourrait bien accélérer une mutation nécessaire. Car dans la turbulence, une opportunité se dessine : celle de repositionner le pays comme un acteur clé dans les nouvelles logiques de production mondiales.

Grâce à sa position géographique, à la stabilité de son climat d’affaires et à ses multiples accords de libre-échange, le Maroc peut devenir une plateforme industrielle stratégique pour des investisseurs à la recherche d’alternatives face à l’instabilité commerciale américaine. Produire au Maroc, c’est aujourd’hui accéder à une porte d’entrée vers l’Afrique, l’Europe, le monde arabe. Un levier de compétitivité que la surtaxe pourrait paradoxalement renforcer.

Ce tournant impose néanmoins une transformation en profondeur. Il ne suffit plus d’exporter à bas coût. Le Maroc doit investir dans la qualité, l’innovation et la montée en gamme de ses produits. Face à la volatilité des grandes puissances, seule une stratégie fondée sur la valeur ajoutée permettra au pays de sécuriser ses acquis et d’élargir ses horizons.

Cela implique de repenser les chaînes de production, de miser sur la formation, sur la recherche, sur la labellisation, pour conquérir de nouveaux marchés plus exigeants mais plus rentables. L’objectif n’est pas uniquement de compenser les pertes, mais d’amorcer un repositionnement durable.

La réponse ne peut être uniquement industrielle. Elle doit aussi être politique. Le Maroc a tout intérêt à renforcer ses partenariats régionaux, en particulier sur le continent africain. La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) constitue un levier essentiel pour réduire l’exposition aux décisions unilatérales de Washington ou de Pékin. En consolidant sa présence sur le continent, en développant des infrastructures logistiques et en facilitant les flux intra-africains, le Royaume peut construire un avenir commercial plus équilibré et souverain.

La surtaxe Trump agit comme un catalyseur. Elle oblige à poser des questions de fond : sur la dépendance à certains marchés, sur la nature de notre offre exportable, sur la résilience de notre tissu productif. Mais elle ouvre aussi une voie. Celle d’un Maroc plus stratégique, plus sélectif, plus ambitieux. Un Maroc qui ne cherche pas simplement à écouler sa production, mais à s’imposer comme un acteur incontournable dans une économie mondiale en recomposition.

Le choc est réel, mais la réponse pourrait être historique.

Quitter la version mobile