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Le Maroc, hub maritime africain en pleine ascension

Le Maroc, hub maritime africain en pleine ascension

L’Afrique dispose d’un potentiel maritime considérable. Avec plus de 30.700 kilomètres de côtes, des dizaines de fleuves navigables et de nombreux lacs, le continent pourrait être l’un des principaux pôles logistiques mondiaux. Pourtant, selon le dernier rapport sur l’intégration régionale publié par la Commission économique pour l’Afrique, la Commission de l’Union africaine et la Banque africaine de développement, son réseau reste en deçà de ses capacités. Le transport maritime assure certes plus d’un cinquième du commerce intra-africain, mais il demeure largement pénalisé par des ports moins performants que ceux du reste du monde.

Le constat est sévère. Les 65 ports reliés par 142 lignes régulières voient leurs marchandises immobilisées en moyenne plus de deux semaines, contre moins d’une semaine en Asie, en Europe ou en Amérique latine. Les coûts de manutention y sont environ 50 % plus élevés et le temps moyen d’arrivée atteint 27,8 heures, soit trois fois plus qu’en Amérique du Nord. Cette inefficacité constitue un frein direct à l’intégration économique du continent, au moment où la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) ambitionne de multiplier les flux entre pays africains.

Dans ce contexte, le Maroc fait figure d’exception. Grâce à une stratégie portuaire menée depuis deux décennies, le Royaume s’est hissé parmi les acteurs majeurs du transport maritime international. Son littoral, long de plus de 3.500 kilomètres, lui offre une position géographique unique à la croisée des routes atlantiques et méditerranéennes. Le développement du port de Tanger Med en a fait une plateforme incontournable, classée premier port à conteneurs d’Afrique et parmi les 25 plus importants au monde.

Tanger Med est connecté à plus de 180 ports répartis dans 70 pays, ce qui lui permet de rivaliser avec les grandes infrastructures d’Asie et d’Europe. Le hub marocain enregistre des performances qui contrastent fortement avec la moyenne africaine : un temps de passage plus court, des coûts de manutention compétitifs et une efficacité opérationnelle alignée sur les standards internationaux. Ce différentiel place le Maroc dans une position privilégiée pour attirer une partie des flux qui, faute de ports performants ailleurs, transitent encore par l’Europe.

Mais la stratégie marocaine ne s’arrête pas à Tanger Med. Casablanca et Jorf Lasfar restent des piliers historiques pour le commerce national et régional, tandis que de nouveaux projets visent à renforcer la place du Maroc comme hub continental. Nador West Med, en cours de réalisation, doit offrir une nouvelle porte d’entrée stratégique sur la Méditerranée orientale. Plus au sud, Dakhla Atlantique s’inscrit dans une logique de projection vers l’Afrique de l’Ouest et d’accompagnement du développement des provinces du Sud. Ces projets s’ajoutent à la modernisation des infrastructures existantes et à une politique d’investissement soutenue dans la logistique et les zones industrielles portuaires.

L’enjeu pour le Maroc est double. Sur le plan national, il s’agit de soutenir la compétitivité de l’économie en réduisant les coûts de transport et en sécurisant les chaînes logistiques. Sur le plan régional, le Royaume cherche à consolider son rôle de passerelle entre l’Afrique, l’Europe et l’Asie, en capitalisant sur son avance infrastructurelle. Cette ambition est d’autant plus stratégique que de nombreux pays africains restent pénalisés par des ports saturés, mal connectés ou peu efficaces.

Le contraste est particulièrement marqué avec certains grands ports du continent. Lagos, Durban ou Mombasa, bien qu’importants dans leurs régions respectives, souffrent encore de lenteurs administratives, de goulots d’étranglement logistiques et de coûts élevés. Le Maroc, en misant sur la fluidité, l’automatisation et l’intégration industrielle autour de ses zones portuaires, se positionne comme une alternative crédible pour les investisseurs cherchant à s’implanter en Afrique tout en bénéficiant d’un accès rapide aux marchés internationaux.

À l’heure où l’Afrique cherche à renforcer son intégration économique, le Maroc apparaît donc comme un maillon essentiel de la chaîne maritime régionale. Ses ports, et en premier lieu Tanger Med, montrent qu’il est possible de rivaliser avec les standards mondiaux depuis le continent. Le défi pour les prochaines années sera de consolider cette avance et de l’élargir à travers une meilleure intégration avec les réseaux africains, afin que le pays ne soit pas seulement un hub de transit, mais un acteur central dans la dynamique commerciale de la ZLECAf.

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